Mettre en place les changements nécessaires
Méthode :
Réaliser les changements imposés par la stratégie, en se faisant aider d'une équipe appropriée (incluant ou non des partenaires extérieurs pour des apports d'expertise, des échanges d'expériences ou un accompagnement des évolutions à réaliser, dans les domaines où cela semble le plus difficile). Développer une approche dynamique de l'action stratégique, en utilisant le plus possible le management par projets (il oblige à gérer des délais et des imbrications d'actions complémentaires).
Pour changer de façon satisfaisante, il faut le vouloir, en avoir les moyens et s'y être préparé. Les problèmes sont fréquents car il est difficile de rassembler toutes ces conditions chez ceux qui sont concernés par les changements organisationnels. Quand c'est possible, il vaut mieux changer par modifications progressives, sans être obligé d'agir rapidement ou par ruptures. Pour y parvenir, on peut inciter les salariés à faire évoluer d'eux-mêmes leurs activités, dans un va-et-vient concerté entre les objectifs et les pratiques opérationnelles.
Remarque :
Écrire et prévoir ce qu'il faut faire n'est pas le plus compliqué. Ce qui est compliqué, c'est de mettre en œuvre ce qui apparaît comme le plus satisfaisant pour la pérennité de l'entreprise.
D'une façon générale, les organisations deviennent plus complexes et plus mobiles. Pour s'y sentir à l'aise, les salariés doivent élargir leurs compétences professionnelles et s'habituer à des contenus d'emploi évolutifs. Il faut les y aider.
Le sentiment d'être confronté à une situation complexe est relatif. Il peut dépendre des niveaux d'apprentissage. Pour une personne, un problème est complexe tant qu'elle ne l'a pas compris ; tant que sa résolution ne fait pas plaisir, mais représente une menace ou un défi insurmontable, ce problème rend passif et fait recourir au pouvoir de "ceux qui savent" (les élites ou les manipulateurs). Pour démocratiser l'organisation, il faut communiquer au plus grand nombre les informations et les savoirs qui démystifient la complexité. En clarifiant les choses, on donnera envie de les assumer.
Conseil :
Il est bon d'apprendre à combiner le simple et le complexe.
Exemple :
Par exemple, on peut rendre plus subtil un diagnostic (en augmentant les paramètres pris en compte), afin d'augmenter les solutions d'action (ce qui, en définitive, simplifie la prise de décision). D'un système complexe, on peut tirer de plus grandes facilités de fonctionnement (à l'image de la technologie domestique ou de la micro-informatique). Pour dire les choses autrement, un moteur plus compliqué permettra peut-être une conduite plus facile. Mais sil est mal fait, il nous obligera d'aller sans cesse au garage.
Une organisation peut gérer son évolution comme une suite de micro-changements décidés en concertation ; les salariés participent au diagnostic des situations de travail avec l'encadrement et les services fonctionnels ; les pratiques opérationnelles sont évaluées en permanence, ce qui conduit à des projets d'aménagement (chantiers techniques, réorganisations partielles, amélioration d'outils).
Ce n'est possible que dans le cadre d'un management participatif où les salariés se sentent concernés par les projets de leur entreprise et puissent y inscrire leur propre stratégie d'action.
Prenons maintenant le cas de changements qui entraînent des ruptures en matière de postes, de fonctions ou de modes organisationnels.
La façon de changer est aussi importante que les contenus du changement ; cette remarque renvoie aux intentions sous-jacentes, à l'esprit dans lequel est mis en place le pilotage du changement, et aux méthodes choisies pour négocier l'intervention avec les personnes concernées.
La qualité du changement dépend aussi du diagnostic préalable à l'action ; ce dernier doit inclure des aspects techniques, économiques, organisationnels et sociaux.
Les styles de pouvoir utilisés doivent être appropriés à la situation, en cher- chant l'équilibre entre une démarche autoritaire (qui impose en suscitant des rébellions - directes ou rusées) et un système trop consensuel (qui ralentit l'action, facilite certains contrepouvoirs et dilue parfois le sens des décisions). Il faut bien sûr prendre en compte les organisations syndicales et les partenaires sociaux.
Un changement n'est réussi que s'il est intégré dans le quotidien par ceux qui en vivent les conséquences. Il faut donc en débattre avec eux et accepter de n'en avoir jamais vraiment fini avec les ajustements nécessaires.
Par exemple, un outil de gestion n'existe en tant que tel que lorsqu'il est intégré dans les fonctionnements organisationnels de l'entreprise qui l'a importé ou élaboré. C'est en se frottant aux usages internes, en s'y adaptant (parfois au prix de lourdes transformations) qu'il devient, à proprement parler, un instrument efficace de l'action collective.
Les gens qui refusent un changement ont souvent de bonnes raisons d'agir de la sorte. Ils perçoivent les transformations comme des obstacles à leurs attentes ou à leurs stratégies personnelles. Seul un échange basé sur leurs représentations et leurs enjeux permet de comprendre les problèmes. En prendre conscience est quelque chose de subtil, car certains salariés ne disent qu'indirectement ce qu'ils souhaitent vraiment. Un bon responsable social doit ressentir les choses au-delà des mots ou des comportements apparents.
Ce qu'il faut appréhender, c'est sur quoi sont fondées les réticences ou les oppositions :
s'il s'agit de malentendus, on peut les corriger par un effort d'échange et d'explication ;
s'il y a des différends incontournables, il faut passer par la négociation quand elle est possible, et sinon par un rappel constant des contraintes qui ont amené à prendre les décisions.
On peut toujours présenter les choix dans un langage qui les fasse entendre (qui en fasse accepter le bien-fondé), même s'il est difficile de les accepter (à cause des coûts, des risques ou des perturbations qu'ils représentent). La compréhension des contraintes est une première étape, sinon pour les admettre par rapport à soi-même, du moins pour ne pas en accuser a priori les managers ou l'organisation.
Les principales résistances viennent de la peur de perdre des avantages acquis, mais aussi de l'inquiétude liée aux perturbations des modes habituels de pensée ou d'action. Un changement contraint souvent à modifier sa culture personnelle. Il y a aussi, bien sûr, l'inertie normale devant l'effort de se remettre en cause et d'évoluer. D'autres craintes sont elles aussi très vives : celle de manquer de compétences par rapport aux nouvelles tâches proposées, celle de se faire critiquer si l'on se trompe ou si l'on a des difficultés à apprendre. Les résistances sont d'autant plus grandes qu'on n'a pas bien expliqué les objectifs et les conséquences du changement. Les uns en tirent encore plus de peur face à l'inconnu qui les attend, les autres se sentent manipulés par une direction qui tire les ficelles et les utilise comme les marionnettes de son projet.
Attention :
Les résistances peuvent s'exprimer indirectement par du scepticisme, de la passivité (du retrait) ou un feu de critiques tournées vers les autres (ce qui évite de se remettre en cause). Il faut déjà un minimum de confiance pour que les vrais problèmes soient posés.
Exemple :
Concrètement, les salariés ont besoin de pouvoir donner des réponses aux questions suivantes :
qu'est-ce qui est à l'origine de l'évolution envisagée ? Qui décide, au nom de quoi et dans quels buts ?
dans le changement escompté, auront-ils le choix des règles ou des moyens d'action, ou va-t-on les leur imposer ? Quel sera leur degré d'autonomie ? De quelles ressources vont-ils disposer pour pouvoir s'adapter ? A-t-on prévu de les former, quand, comment, et avec quelles chances de réussite ?
que se passera-t-il si le changement ne leur convient pas ou s'ils n'y trouvent pas leur place ? Leur donnera-t-on des solutions de rechange ? Quelles garanties peut-on leur offrir d'un point de vue matériel, statutaire ou relationnel ?
Remarque :
Ces interrogations existent toujours, même si elles ne sont pas exprimées. Il faut éclaircir d'emblée ce qui est connu ou peut faire l'objet d'échanges, tout en se donnant les moyens de répondre au reste, peu à peu, à travers l'action de changement.
Conseil :
Pour piloter un changement, on doit lui donner un cadre opérationnel assez précis (planning des actions, responsabilités, résultats probables) ; cette structure a pour but de rassurer les partenaires, tout en permettant la répartition des tâches et le contrôle des évolutions.
Au-delà, on doit offrir des moyens de participations multiples, à travers des processus d'ajustements (groupes de réflexion et de clarification, équipes chargées de mettre en œuvre des projets partiels, stages de formation) ;
Définition :
ces processus sont à la fois :
des lieux d'apprentissage ;
des moyens de diagnostic par rapport aux conditions d'implantation et de mise en œuvre du changement. Les intéressés s'expriment sur la façon dont ils voient le changement, sur les problèmes qu'il va poser, sur ce qu'il faut prendre en compte en fonction de la structure actuelle, de son fonctionnement et des qualifications des personnes en place ;
des recherches de solutions en matière d'évolutions de postes et de reclassements ;
des idées en matière de choix techniques et organisationnels. Par exemple, une implantation d'équipements n'est opérationnelle que si on a réglé toutes sortes d'ajustements pour lesquels on a besoin des utilisateurs. Il faut adapter les équipements au contexte de l'organisation. C'est pourquoi toute modernisation efficace doit être négociée ;
une réflexion sur ce que sera l'activité une fois le changement réalisé. Les participants se préparent peu à peu à la nouvelle organisation. Dans la mesure où ils y participent, ils résolvent d'eux-mêmes un certain nombre de difficultés ; leurs résistances diminuent en faveur d'un sentiment de responsabilité.
Fondamental :
N'oublions pas qu'à partir d'une certaine dimension, un changement est souvent une situation de crise, entraînant des phénomènes de rupture par rapport à des habitudes ou à des comportements antérieurs. Il convient que cette crise soit gérée comme telle :
en en limitant les effets ou la portée ; c'est pourquoi il est important, d'un point de vue psychologique, de maintenir certaines continuités : dans le pro- gramme de changement lui-même, dans l'implication et le maintien en place des dirigeants qui ont suscité l'action ;
en acceptant que les individus aient à faire le deuil de ce à quoi ils renoncent, même si la situation nouvelle promet d'être avantageuse.
Attention :
Tout changement amène une transformation des activités professionnelles. Il touche aux technologies, aux modalités opératoires et aux fonctionnements du travail. Mais bien que d'une façon moins nette, il influence aussi les caractéristiques du système social dans lequel les gens vivent.
Conseil :
Quand ils doivent évoluer, les salariés sont très sensibles aux habitudes sociales qu'ils ont apprises à l'intérieur de leur groupe d'appartenance. Il faut les aider à en changer, sans les heurter ni les déstabiliser :
on tâchera qu'ils puissent rester insérés dans des réseaux relationnels satisfaisants ;
on tiendra compte, dans les compétences qu'il leur faut acquérir, aux caractéristiques des groupes dans lesquels ils ont travaillé (règles de fonctionnement, valeurs, habitudes, codes relationnels, style de commandement des responsables). Quelqu'un qui a survécu pendant dix ans avec un chef autoritaire ne va pas prendre des initiatives parce qu'il est nommé dans une équipe à management participatif. Du reste, lui a-t-on demandé son avis ?
si nécessaire, on leur enseignera de nouveaux savoir-faire, de nouvelles formes de raisonnement, de nouvelles façons d'échanger avec les autres ou de s'engager dans l'action.
Fondamental :
Un changement doit être activé par trois types de facilitateurs, avec la coordination d'un chef de projet.
Les facilitateurs politiques sont ceux qui donnent du pouvoir d'action. Ce sont les dirigeants et les responsables opérationnels, dont la participation au changement est nécessaire pour définir les orientations, octroyer les ressources ou contrôler les résultats. S'ils manquent d'implication, c'est mal ressenti, car cela donne l'impression que le changement a peu d'importance, donc peu de valeur ou de garanties de concrétisation.
Les facilitateurs techniques sont ceux qui apportent au changement les outils, les méthodes et l'expertise permettant d'agir avec pertinence et qualité ; ils aident à faire les bons choix. A priori, leur présence est vécue comme une opportunité ; mais elle démobilise s'ils sont autoritaires ou obsédés par leurs technologies. Leur travail est plutôt de donner des explications, en langage compréhensible, et d'offrir des alternatives opératoires, plutôt que d'obliger leurs interlocuteurs à passer par leurs préférences.
Les facilitateurs sociaux sont ceux qui créent ou maintiennent une énergie positive à l'égard du changement (personnels de DRH, animateurs d'équipes, consultants) ; ils stimulent et soutiennent pendant le processus. Ils seront respectés s'ils contribuent à la sincérité des échanges et des participations proposées. Leur mission est de faire que les uns écoutent les autres, que les discussions aient des conséquences opérationnelles, et que les méthodes de travail en groupe soient efficaces.
Dans les petits changements, une même personne peut remplir simultanément les trois rôles. Pour des enjeux plus lourds, il faut répartir les tâches. Les directions des ressources humaines sont souvent chargées de la facilitation sociale, soit directement, soit par formation des cadres opérationnels qui s'y emploieront.
Remarque :
Les modèles de changement sont multiples. Leur portée dépend des organisations, des contraintes liées aux circonstances ou au contexte et du temps dont on dispose pour transformer l'existant :
plus le savoir d'expert est déterminant par rapport au choix collectif, plus on peut imposer une décision. Dans le cas inverse, il est fondamental de passer par la concertation, sauf s'il y a véritable urgence. Quand la situation requiert à la fois de l'expertise et de l'acceptation, on essaiera d'obtenir un accord minimal des salariés, à partir d'une réflexion technique sur les alternatives possibles de certaines décisions.
les choix doivent être réalistes et tenir compte des forces en présence. Une solution optimale est rarement la plus rationnelle, au sens des théories formelles de la décision (calculs économiques, évaluations financières). C'est plutôt celle qui intègre les stratégies et les pouvoirs de tous les acteurs concernés (leurs représentations des choses, leurs capacités de réagir à l'action pour l'empêcher, l'enliser ou la détourner de ses buts) ;
pour convaincre des enjeux nécessaires, il faut partir des façons de voir et des besoins des différents personnels de l'organisation (en tant que groupes, catégories d'acteurs ou individualités) ; il peut être utile de passer par l'impulsion et l'initiation de ceux qui ont senti l'intérêt du changement (groupes de pilotage, expériences-pilotes).
Les bonnes décisions sont des choix raisonnables que les salariés peuvent s'approprier pour les traduire dans l'action.
Complément :
Bibliographie, pour aller plus loin.
AFPLANE, Management stratégique des PME/PMI, Guide méthodologique, Paris, Economica, 1991
LARIVET Sophie, Intelligence économique, enquête dans 100 PME, Paris, L'Harmattan, février 2009,
MARCHESNAY Michel, « La PME, une gestion spécifique », Economie rurale, n° 206, pp. 11-17, 1991
MARCHESNAY Michel, Management stratégique, Editions ADREG, 2004.
MEUNIER Alain, PME, les stratégies du succès. Guide d'analyse stratégique, Paris, Dunod, 2007
MINTZBERG Henry, Structure et dynamique des organisations, Paris, Editions d'Organisation, 1982.
MINTZBERG Henry, Safari en pays stratégie, Paris, Village Mondial, 1998.
PARIOT Yves, 50 outils de pilotage pour les PME, Paris, Eyrolles, 2010.
PARLIER Michel, « Carte d'identité des PME, un univers hétérogène », Revue ANDCP Personnel, n° 450, juin 2004, pp. 23-26.
VIARDOT Eric, Dix leçons de stratégie, Paris, The BOOK éditions, 2009
111 000 (au total, arriver à environ 250 000 caractères, soit à peu près 100 pages rédigées, sans les schémas et les systèmes de dynamisation propres au dispositif de E-LEARNING – QUIZZ, questionnaires, petits cas à traiter en direct – 2 à 3 par chapitre).
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