Présentation générale des théories des organisations

Traditions d'analyse

On sait que l'organisation est une réalité à facettes multiples. Si l'on prend le cas de l'entreprise, par exemple, on considérera qu'elle est tout à la fois :

  • un agent de production : l'entreprise rassemble et combine des ressources matérielles, financières, techniques et humaines pour produire des biens et/ou des services à destination de clients finals. C'est ce que symbolise la représentation de l'entreprise en tant que fonction de production ;

  • une organisation sociale : la réalisation de la production requiert la participation de personnes aux compétences diverses. L'entreprise est ainsi constituée d'objets sociaux (des personnes, des équipes) entre lesquels se nouent des relations où circulent des biens ou des services, des informations, des influences, des sentiments. A mesure que les personnes travaillent ensemble, elles développent une certaine vision de leur cadre de travail, une certaine conception des comportements acceptables, un corps de représentations et de règles. En d'autres termes, l'entreprise possède une ou des cultures qui représentent un apprentissage accumulé à l'occasion de la résolution des problèmes de coordination des activités et d'adaptation à l'environnement qu'elle rencontre ;

  • une réalité politique, au sens où les acteurs en présence cherchent à façonner la situation dans un sens conforme à leurs intérêts. Cela vaut pour ce qui est du fonctionnement interne, puisque l'entreprise est un lieu de confrontation et de négociation entre individus et/ou entre groupes dont on ne peut postuler a priori l'homogénéité des préférences. Cela vaut également sur le plan des relations que l'entreprise entretient avec les acteurs composant son environnement : l'entreprise est en effet confrontée à un ensemble d'individus et d'autres organisations qui poursuivent leurs propres projets et vis-à-vis desquels il lui revient de faire des choix de comportements plus ou moins actifs.

Face à une telle réalité, il est assez naturel qu'un théoricien exprime une préférence de point de vue ou soit davantage intéressé par l'une ou l'autre de ces facettes, souvent celle qu'il considère comme la plus importante. Cette tendance nourrit évidemment une certaine myopie et l'on peut souhaiter le développement de visions intégrées. Les essais de ce type, peu nombreux, restent cependant souvent marqués par une hiérarchisation, au moins implicite, des dimensions ou des facettes de l'organisation.

Puisque les organisations retiennent l'attention de multiples disciplines (économie, sociologie, gestion, psychologie, ethnologie, sciences politiques, voire mathématiques, etc.), on imagine facilement le diversité des propositions d'analyse. Il est malgré tout possible, au prix d'une certaine simplification, de les réduire à quelques grandes familles ou traditions d'analyse. On retiendra trois grandes traditions, privilégiant chacune une certaine conception de l'organisation et une problématique centrale. Plusieurs écoles de théorie des organisations peuvent à chaque fois y être rattachées :

La tradition techno-économique

  • Conception de l'organisation : la coordination rationnelle d'un ensemble d'individus, à la poursuite d'un but ou d'un objet commun, à travers une division du travail et une hiérarchie de l'autorité et des responsabilités

  • Problématique centrale : recherche d'adéquation entre besoins de traitement d'information liés à la nature de la tâche et au degré d'incertitude, et capacités de traitement d'information qu'offrent les différentes modalités d'agencement possibles de l'organisation

  • Courants représentatifs : théorie classique de l'organisation, théorie de la contingence structurelle, économie de l'organisation, etc.

La tradition socio-culturelle

  • Conception de l'organisation : ensemble dont la cohérence est maintenue par le partage de normes, de valeurs, de croyances, formant une culture

  • Problématique centrale : le développement d'une culture ou d'une identité ; l'intégration des individus

  • Courants représentatifs : le mouvement des « relations humaines », le courant « ressources humaines », le courant « culturaliste », etc.

La tradition politique

  • Conception de l'organisation : une coalition d'individus aux préférences potentiellement mal définies, changeantes, et incohérentes entre elles. Les membres de la coalition calculent constamment l'équilibre « incitations/contributions »

  • Problématique centrale : celle des bénéficiaires de l'organisation plutôt que celle de la qualité du fonctionnement

  • Courants représentatifs : perspective initialement développée par Cyert & March ; analyse stratégique des organisations ; théorie de la dépendance en ressources ; etc.

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