Présentation générale des théories des organisations

Les niveaux d'analyse

On a vu que le développement de la théorie des organisations se caractérise, notamment, par un élargissement progressif des centres d'intérêt.

Il reste que l'on peut reclasser les différents courants théoriques en deux grands groupes, selon le niveau d'analyse qu'ils privilégient.

Certains courants se positionnent dans une perspective que l'on peut qualifier de « micro ». Ce sont les écoles qui s'intéressent à la façon dont les organisations considérées individuellement modifient leurs structures et leurs pratiques pour prendre en compte les exigences ou les contraintes caractéristiques de leur environnement immédiat (ce que l'on appelle l'environnement de tâche).

Appartiennent notamment à cette catégorie :

  • La théorie de la contingence et les prolongements que propose de L. Donaldson

  • La théorie de la dépendance en ressources

  • La théorie des coûts de transaction

D'autres courants adoptent une approche que l'on peut qualifier de « macro » en s'intéressant à l'évolution d'agrégats d'organisations caractéristiques de collectivités organisationnelles comme le champ ou le secteur d'activités. C'est le cas, notamment de :

  • La théorie de l'écologie des populations

  • La théorie néo-institutionnelle

Perspective

Théorie

Contenu

Apports et limites

« micro »

Théorie de la contingence

(TC)

La TC prend le contre-pied de la théorie classique en posant qu'il n'existe pas de modèle universel, idéal d'organisation. L'efficacité d'une organisation est fonction de l'ajustement de sa structure organisationnelle à des données de contexte. Le rôle de la direction de l'organisation est d'assurer cet ajustement et de le reconstruire à mesure que le contexte change.

Ces idées résultent d'un ensemble d'observations concrètes qui expriment à chaque fois une déclinaison particulière de l' thèse principale, selon le sens que l'on donne au mot « contexte » (la technologie, la taille de l'organisation, des caractéristiques d'environnement, la stratégie de l'entreprise, voire des données culturelles)

La TC a, pendant un bon moment, fait figure d'orthodoxie en matière d'analyse des organisations.

Il s'agit d'un courant à portée potentiellement pragmatique dans la mesure où il apporte des éléments de réponse à la question : « quelle est la bonne façon de s'organiser » ?

La multiplication de travaux empiriques aux résultats contradictoires a fragilisé cette théorie. La tonalité déterministe et la tendance à réifier l'organisation et son environnement caractéristiques de ce courant ont également été largement contestés.

Théorie de la dépendance en ressources

(TDR)

Même niveau d'analyse et même problématique que la théorie néo-contingente mais la TDR ne se cantonne pas aux changements de structure interne et s'intéresse aux actions permettant de gérer l'interdépendance de l'organisation avec les autres organisations de son environnement.

Travaux de référence :

1 - Hickson & al (1971) :

- le pouvoir revient aux sous-unités qui réussissent à faire face aux contingences stratégiques qui affectent les autres sous-unités

- le pouvoir d'une sous-unité est d'autant plus grand qu'elle est non substituable

2 - Pfeffer & Salancik (1974) : une version départementale de la TDR

- la contingence stratégique à laquelle font face toutes les unités d'une organisation est l'acquisition de ressources

- les unités qui acquièrent des ressources valables pour les autres détiennent du pouvoir sur ces dernières

- la relation entre acquisition des ressources et pouvoir s'auto-renforce :

3 - Pfeffer & Salancik (1978) : extension des principes de base de la TDR aux relations entre l'organisation considérée et les autres organisations situées dans son environnement immédiat. La plupart des organisations c herchent à préserver leur autonomie en se protégeant de la dépendance vis-à-vis des autres organisations

La TDR apporte des éclairages sur les phénomènes de répartition des pouvoirs au sein de l'organisation et sur les jeux politiques entre cette dernière et ses partenaires extérieurs.

Il est possible de l'articuler avec la perspective « enactment » de Weick : les contingences stratégiques ne sont pas simplement des données mais font l'objet d'interprétations concurrentes.

Les critiques qui lui sont adressées portent sur l'accent excessif qu'elle met sur les phénomènes politiques au détriment de la rationalité managériale et sur le caractère flou d'un certain nombre de notions (par exemple, la notion de « contingence stratégique)

Théorie des coûts de transaction

La TCT retient le même niveau d'analyse que la théorie contingente et la TDR mais adopte une unité d'analyse différente : la transaction.

La question traitée est celle de savoir comment les transactions sont gouvernées. Pour la TCT, les attributs des transactions deviennent les déterminants de la variété des structures de gouvernance

La TCT permet d'expliquer les décisions de fixation des frontières de l'entreprise et des manœuvres stratégiques comme l'intégration verticale.

Certains lui reprochent de surestimer le rôle des logiques d'efficience et de négliger de ce fait les explications à base de logiques de pouvoir et d'être

trop centrée sur le phénomène d'opportunisme au détriment des autres logiques susceptibles d'inspirer les comportements.

« macro »

Théorie de l'écologie des populations

Considérant que de nombreux facteurs limitent les capacités d'adaptation de l'organisation individuelle, la TEP se place au niveau de populations d'organisations pour en expliquer la dynamique. L'élément théorique central de ce courant est de considérer que les organisations sont soumise à un processus de sélection par l'environnement : les organisations en adéquation avec les exigences de l'environnement possèdent un avantage en matière d'acquisition de ressources. Elles sont « sélectionnées » pour survivre et les autres sont éliminées.

La TEP n'explique pas véritablement les mécanismes de sélection et peine à rendre compte de l'apparition de nouvelles formes organisationnelles.

En ne prenant pas en compte les structures internes de l'organisation, elle ne permet pas non plus d'expliquer pourquoi une organisation meure tandis qu'une autre survit dans le même environnement.

Théorie néo-institutionnelle

(TNI)

La TNI porte davantage d'attention à la structure interne des organisations que la TEP.

Les déterminants de cette structure relèvent de phénomènes et de processus sociologiques se situant à un niveau d'analyse plus élevé que l'environnement immédiat de tâche des organisations. D'où la notion de champ organisationnel qui constitue le niveau d'analyse privilégié.

Un champ organisationnel se structure progressivement du fait des interactions entre organisations qui le constituent. Dès lors que des organisations disparates sont structurées en un champ organisationnel, un domaine de vie sociale, des forces puissantes les conduisent à devenir semblables.

La TNI met l'accent sur la mesure dans laquelle le comportement des organisations est conforme, habituel, non réfléchi et socialement défini. Les organisations opèrent dans un cadre social de normes, de valeurs et d'hypothèses tenues pour garanties quant à ce qui constitue un comportement acceptable ou approprié.

Avec le temps, la TNI s'est enrichie, complexifiée et relativisée sur un certain nombre de points.

On accorde désormais plus d'importance au processus d'institutionnalisation lui-même, à la question du changement institutionnel et à celle du pluralisme institutionnel (situation à laquelle est confrontée une organisation opérant dans de multiples sphères institutionnelles), autant de thèmes à propos desquels la version initiale de ce courant apportait peu de choses.

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