Une typologie catégorisant des structures organisationnelles
En théorie des organisations, de nombreux courants se sont intéressés à la question de savoir ce qui peut expliquer les différences observables de la façon dont les organisations sont agencées. Ce mode d'agencement est ce qui est le plus souvent désigné par la notion de structure organisationnelle. Comme pour de nombreuses notions, il n'en existe pas de définition parfaitement consensuelle, mais plutôt une variété de modes d'approche. La conception la plus répandue consiste à dire que la structure organisationnelle est la configuration formelle des rôles et des procédures, officiellement consacrée, destinée à orienter les comportements des membres de l'organisation en spécifiant ce qu'ils doivent faire et ce qui sera récompensé. Au-delà de la variété des définitions, un certain consensus s'est formé pour considérer qu'une structure organisationnelle se compose de deux grandes catégories d'éléments : le mode de départementalisation et les systèmes de gestion.
Définition :
le mode de départementalisation exprime les critères fondamentaux de la division du travail entre les membres de l'organisation et les modes de coordination des tâches. Ce sont les éléments les plus manifestes de la structure organisationnelle, dont un outil comme l'organigramme est destiné à rendre compte. Un tel outil renseigne tout à la fois sur la façon et le degré auxquels l'organisation est différenciée (c'est-à-dire a spécialisé ses activités), l'emploi ou non de certains moyens de coordination (la hiérarchie, l'utilisation de comités, de rôles d'intégration, etc.), sur ce qui est stratégique et ce qui l'est moins, en fonction du degré de proximité par rapport au sommet ;
les systèmes de gestion : ce sont les divers dispositifs qui donnent vie à l'organisation et permettent l'accomplissement coordonné des activités : systèmes de planification, d'information, de contrôle, de récompense, etc. Ces éléments réduisent l'incertitude interne, rendent les comportements des individus plus prévisibles. S'ils sont moins manifestes ou visibles que les précédents (un organigramme peut difficilement les décrire), ils n'en sont pas moins des composants structurels dès lors qu'ils constituent des aspects tangibles, officiellement consacrés ou ratifiés.
Dans la mesure où cette structure organisationnelle constitue la base du fonctionnement courant d'une organisation, il est compréhensible qu'elle ait particulièrement attiré l'attention et suscité de nombreux essais typologiques. Parmi ceux-ci, on retiendra à titre d'illustration l'essai qui consiste à distinguer deux grandes formes de structure, les formes dites « mécanistes » et les formes dites « organiques ».
Le tableau suivant en présente les principales caractéristiques :
Structure mécaniste | Structure organique |
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En résumé, une structure mécaniste d'organisation se caractérise par des niveaux élevés de complexité, de formalisation et de centralisation, tandis qu'une structure organique présente des caractéristiques opposées.
Attention :
Il est assez courant d'assimiler la structure mécaniste à la forme bureaucratique exposée par M. Weber, dont les caractéristiques essentielles sont d'ordinaire résumées ainsi :
division rigide du travail ;
hiérarchie clairement définie ;
ensemble de règles gouvernant tous les aspects du fonctionnement de l'organisation (exécution des tâches, discipline, contrôle, etc.) ;
affectation des personnels aux différents postes sur la base des qualifications techniques ;
promotion à l'ancienneté, en fonction des appréciations des supérieurs.
La structure mécaniste rassemble nombre de ces caractéristiques, mais est en outre clairement centralisée alors qu'une bureaucratie ne l'est pas nécessairement : le fait que son fonctionnement est basé sur un ensemble de règles et de procédures strictes autorise un fonctionnement décentralisé puisque ces règles et procédures réduisent fortement le pouvoir discrétionnaire lors de prises de décision décentralisées.
La distinction entre formes mécanistes et organiques est issue du travail réalisé au début des années 1960 par deux théoriciens, T. Burns et G.M. Stalker, sur un échantillon d'une vingtaine d'entreprises anglaises et écossaises appartenant au secteur de l'industrie électronique. Ces deux chercheurs constatent que les entreprises les plus efficaces dans le développement et l'adoption de nouvelles technologies sont celles qui utilisent une structure organique, caractérisée par la flexibilité et l'importance des communications horizontales et informelles, plutôt qu'une structure mécaniste reposant essentiellement sur la coordination par l'autorité hiérarchique. On en a déduit que la structure mécaniste est tout à fait adaptée à l'exécution de tâches routinières, standardisées, dans un contexte environnemental stable, tandis que la structure organique vaut pour les situations marquées par l'instabilité technologique ou commerciale. Ce travail est l'une des recherches fondatrices de la théorie de la contingence structurelle et reste aujourd'hui encore, une référence quasi-permanente.
Complément :
Certains courants de théorie des organisations développent une conception dite interactionniste de la structure organisationnelle qui consiste à l'appréhender comme l'ensemble des régularités dans les comportements des acteurs, tels qu'ils sont observables au cours du temps. La structure n'est plus considérée comme un cadre prescrit de comportements mais comme une construction que la régularité de ces comportements fait émerger, le produit joint des différentes stratégies d'acteurs. L'un des mérites de cette conception est notamment d'attirer l'attention sur les phénomènes informels qui caractérisent le fonctionnement des organisations. Si les structures sont souvent considérées comme des constructions rationnelles et délibérées, leur concrétisation par des comportements d'acteurs totalement conformes à ce cadre prescrit se vérifie rarement, d'une part parce que les acteurs jouent les rôles en fonction de leur perception de ce que l'on attend d'eux et de leur définition et de leur interprétation des situations, d'autre part parce que les structures formelles peuvent présenter des lacunes ou des contradictions.